dimanche 22 février 2015

Pronostics


καλημέρα.

Pour ce dernier mois d'hiver qui arrive à grands pas, nous jouerons avec l'Orfeoscar de la meilleure actrice 1956. Et un bonheur n'arrivant jamais seul, suivra dans la foulée l'Orfeoscar du meilleur second rôle féminin de la même année.

Et pourquoi 1956, d'abord? D'une part parce que c'est une année dont les cinéphiles parlent peu, et où ils ont généralement du mal à s'intéresser aux performances nommées, ou aux films dont elles sont issues, si bien que l'absence de consensus rend le jeu totalement imprévisible, et c'est justement ça qui est bon. D'autre part, parce que 1956 est une année extrêmement colorée qui excite de bien des manières: films épiques et historiques, décors chamarrés et costumes flamboyants donnent l'impression de voyager et revêtent un je-ne-sais-quoi de très rassurant, sans doute parce que les films des années 1950 me permettaient de m'évader le samedi après-midi un weekend sur deux, avant la perspective de dimanches humiliants dans une maison glauque, dont je garde un souvenir terrifiant.

Alors, pour chasser ces réminiscences du passé, voici sans plus tarder la liste des films visionnés pour l'année 1956. Attention néanmoins, il m'en reste encore une petite quinzaine à voir dans cette liste, ce qui sera fait dans le courant du mois avant que je n'écrive mes articles:

Alexander the Great, The Ambassador's Daughter, Anastasia, Anything Goes, Autmun Leaves, Baby Doll, Backlash, The Bad Seed, Between Heaven and Hell, Beyond a Reasonable Doubt, Bhowani Junction, Bigger Than Life, The Black Sleep, The Bold and the Brave, The Brave One, Bundle of Joy, Bus Stop, Carousel, The Catered Affair, The Court Jester, Dakota Incident, Diane, The Eddy Duchin Story, Forbidden Planet, Forever Darling, Friendly Persuasion, Gaby, Giant, The Girl Can't Help It, High Society, Invasion of the Body Snatchers, Invitation to the Dance, The Iron Petticoat, Julie, The Killing, The King and Four Queens, The King and I, A Kiss Before Dying, Lust for Life, The Man in the Gray Flanel Suit, The Man Who Knew Too Much, The Maverick Queen, Miracle in the Rain, Moby Dick, Navy Wife, Pillars of the Sky, Please Murder Me, The Proud and Profane, The Rainmaker, The Revolt of Mamie Stover, Richard III, Run for the Sun, The Searchers, Storm Center, Tea and Sympathy, Teenage Rebel, The Ten Commandments, There's Always Tomorrow, Trapèze, War and Peace, While the City Sleeps, Written on the Wind, You Can't Run Away from It.

Parmi les films étrangers également éligibles pour 1956 aux Etats-Unis, notons: Le Ballon rouge, Gervaise, La Harpe de Birmanie, Les Sept Samouraïs et La strada.

A mon grand regret, je n'ai jamais réussi à mettre la main sur The Solid Gold Cadillac où Judy Holliday a très bonne presse, ni sur The Opposite Sex, qui même si peu alléchant reste quand même à voir histoire de. J'ai aussi fait l'impasse sur Around the World in 80 Days qui a très mauvaise réputation, et d'ici la publication des articles, j'essaierai d'acquérir The Wrong Man.

Alors, qui seront les cinq finalistes, en premiers comme en seconds rôles? Tout cela et bien plus encore au prochain numéro! Et bon courage à ceux qui regarderont les Oscar ce soir, vous allez mourir d'ennui!

mardi 10 février 2015

Horreur!


Au secours! Je viens juste de réaliser que Dr. Jekyll and Mr. Hyde, sorti à New York le 31 décembre 1931, est en fait un film de 1932, tout du moins selon les critères d'éligibilité oscariens (qui à l'époque ne se posaient pas la question puisqu'on fonctionnait en saisons de juillet à juin). Mais il n'y a pas plus triste nouvelle, car pour moi, Dr. Jekyll était le grand film de 1931, destiné à être nommé cette année-là, et je dois changer tous mes plans!

J'en viens à questionner l'utilité de prendre l'industrie angelena comme base de départ. D'un côté, c'est formidable quand on veut organiser des listes, car ça fait un point local précis à partir duquel sélectionner ce qui est éligible ou non pour une année donnée, mais de l'autre, tous ces films sortis à cheval sur deux années posent problème et donnent une impression de décalage. Comme je ne suis pas tout à fait les règles de l'Académie, faisant remonter mes remises de prix personnelles à 1920, je pourrais également m'accorder des libertés et lister tous les films d'une année "a", même ceux sortis le tout dernier jour d'éligibilité dans l'ensemble des Etats-Unis, pour une cérémonie "a". Mais ça m'obligerait à considérer Camille comme un film de 1936 ou Casablanca comme un film de 1942, ce qui décalerait tout et m'empêcherait d'aligner mes articles sur les cérémonies hollywoodiennes.

Afin d'être absolument rigoureux, je dois alors continuer à garder Los Angeles en point de mire et bel et bien considérer Dr. Jekyll comme un film de 1932 (et accessoirement Magnificent Obsession comme un film de 1936...), vu que c'est le seul moyen de rester logique, sans compter que j'ai volontairement choisi de me focaliser en priorité sur l'industrie anglophone, et principalement l'industrie américaine, donc hollywoodienne. De toute façon, les films sortis un 31 décembre sont vus par la plupart des spectateurs l'année suivante, ce qui fait sens après tout, de les récompenser pour l'année où la majorité du public les a vus en salle.

Le problème, c'est que l'historique des Oscars est loin d'être clair. Suspicion, sorti le 14 novembre 1941 de manière officielle, mais seulement le 20 janvier 1942 à Los Angeles, a bel et bien été éligible pour les Oscars 1941. Selon les mots de l'AFI, il est même nettement précisé que: "Although the film officially opened in Los Angeles on 20 Jan 1942, RKO screened the film on 11 Jan 1942 in order to qualify it for the [14th] Academy Awards, according to material contained in the production files at the AMPAS Library." Los Angeles n'a donc vu le film qu'à partir de 1942, mais ce fut pourtant bel et bien éligible pour 1941 (d'où le dépit décuplé d'Olivia de Havilland)... Et Humoresque dans tout ça? L'AFI précise que le film est sorti le 25 décembre 1946, mais à New York, avant une diffusion générale à partir de janvier 1947, supposément à Los Angeles, ce qui n'a pas empêché l'Académie de ne lui donner son unique (!) nomination pour l'an de grâce 1946. A l'inverse, The Woman in the Window, sorti en novembre 1944, n'a été éligible que pour les Oscars 1945, et Adam's Rib, sorti en novembre 1949, fut sélectionné comme étant un film de 1950.

Du coup, j'ai beau tenter de rester logique, rien ne va plus dès qu'on touche aux stratégies promotionnelles de certains films en vue des remises de prix. Je lis certaines personnes qui résolvent le problème en ne prenant en compte que la première date de sortie d'un film, quel que soit ses lieux ou pays d'origine, ce qui simplifie leur tâche car ils n'ont pas à suivre le raisonnement dégénéré des Oscars: un film de 1931 est un film de 1931, point barre. 

Si je fonctionne comme eux, alors je dois décaler Camille ou Casablanca en amont mais ne peux plus jouer à écrire des articles ordonnés où je compare les sélections officielles aux miennes. Si je fonctionne comme les Oscars, alors je dois décaler Dr. Jekyll en aval mais pas Suspicion, avant d'être livré à moi-même avec Adam's Rib... Mais il me semble tout de même nécessaire de conserver un point d'ancrage à Los Angeles afin de clarifier certaines choses (je pense aux films britanniques, souvent sortis aux Etats-Unis avec un an de décalage, et qui n'auraient pas pu être récompensés lors de leur année d'origine, ce qui donne un sentiment d'irréalité aux listes qui prennent en compte Brief Encounter comme un film éligible pour 1945).

Bref, rien n'est logique, tout n'est que désordre et chaos, et je deviens fou. Adieu!


dimanche 1 février 2015

Oscar de la meilleure actrice 1970

Comme précisé l'autre jour, 1970 me faisait un peu peur à l'origine, mais ça tient surtout aux 70's en général, une décennie ayant produit de multiples chefs-d'oeuvre mais qui reste marquée par des styles vestimentaires et des coiffures douteux, des motifs floraux horrifiants, des voitures hideuses et des musiques dont je suis rarement fan. Par bonheur, il ne m'a pas fallu creuser longtemps pour découvrir que l'année en question regorge de bons films, avec d'ores et déjà un top 4 inamovible pour les Orfeoscars (par ordre alphabétique: Five Easy Pieces, Little Big Man, Puzzle of a Downfall Child, et Women in Love, sachant que Ryan's Daughter n'est pas loin derrière, ça dépendra de ce que donnent MASH et Patton), et plusieurs œuvres très sympathiques, qui, sans être ce que leurs auteurs ont fait de mieux, restent fichtrement divertissantes (Darling Lili, Scrooge, The Private Life of Sherlock Holmes, soit autant de films en costumes qui me font voyager et oublier que je n'aime pas l'actualité même des 70's, malgré de bonnes surprises comme The Boys in the Band ou Something for Everyone). 1970 reste donc une très bonne année de cinéma anglophone (et international, je pense notamment à Tristana), aussi mes craintes sont-elles totalement dissipées. Je suppose que ce qui me rebutait de prime abord, c'est la liste des actrices nommées à l'Oscar, constituée de noms que je connaissais peu ou mal, ce qui donne dans le détail:

* Jane Alexander - The Great White Hope
* Glenda Jackson - Women in Love
* Ali MacGraw - Love Story
* Sarah Miles - Ryan's Daughter
* Carrie Snodgress - Diary of a Mad Housewife

Étonnamment, les votants de l'époque en étaient presque au même point que moi puisque pour la première fois depuis les années 1920, aucune des candidates n'avait déjà concouru pour le prix auparavant. Et de fait, il semble que la compétition fut assez ouverte: Glenda Jackson régna sur la critique en début de saison mais fut distancée aux Globes par le succès phénoménal, et plus récent, d'Ali MacGraw dans Love Story, tandis que Carrie Snodgress triomphait des superstars d'alors dans la catégorie comédie (Julie Andrews, Sandy Dennis, Barbra Streisand et Angela Lansbury), preuve que si elle est totalement oubliée de nos jours elle fit véritablement sensation à l'époque. Néanmoins, je ne pense pas qu'elle fût une menace sérieuse, le Globe comédie étant rarement gage de victoire, et s'il y eut duel, ce fut davantage entre Jackson et MacGraw, tout du moins d'après ce qu'une personne sensée ayant vécu à l'époque m'assure. La seconde aurait-elle pu battre la première? Apparemment oui: Love Story fut le plus gros succès de l'année en Amérique et se retrouva nommé pour sept Oscars (dans presque toutes les catégories principales, même second rôle masculin...), ce qui aurait pu permettre à l'actrice d'être reconnue malgré les réactions mitigées du côté des critiques. Cependant, les Oscars ne cédèrent pas à la tentation du hit de l'année et lui préférèrent celle qui était appelée à régner sur les Oscars pendant la première moitié de la décennie, Glenda Jackson. Il faut dire que la révélation britannique ne sortait pas de n'importe où: formée à la RADA et à la Royal Shakespeare Company, puis nommée aux Tonys pour Marat/Sade et remarquée dans l'adaptation cinématographique de la même pièce, son parcours la destinait tôt ou tard à une reconnaissance outre-Atlantique, surtout en cette période de forte consommation de talents anglais (Julie Andrews, Julie Christie, Vanessa Redgrave, Edith Evans, Maggie Smith...). Mais à la réflexion, ce n'est pas tellement par ses œuvres passées qu'elle fut sacrée par les Oscars, mais plutôt par le côté "révélation d'une actrice très charismatique et à l'aura de star dans un film de prestige". Il faut dire que dès qu'on regarde Glenda Jackson, on a sincèrement l'impression d'être figé par l'essence même du charisme tout en étant assommé par 28 volumes d'encyclopédie, tant elle transpire également d'intelligence, aussi semblait-il vraiment très prestigieux de faire une offrande à la déesse cette année-là, quoi qu'on ait pu penser de son interprétation, avant que son courroux ne provoque un déluge. Pourtant, l'actrice n'avait cure des remises de prix et ne se déplaça jamais pour en recevoir un, en ces temps bénis où l'on pouvait encore gagner sans faire des sourires à tout le monde pendant six mois.

A côté, les autres actrices avaient tout de même moins de chances. Carrie Snodgress parce qu'elle figurait dans un film un peu blafard dont rien ne justifiait de distinctions si ce n'est sa performance, et Sarah Miles parce que Ryan's Daughter fut rejeté par la critique, bien que le film rapporta gros au box office et qu'il était difficile de snober une actrice portant une histoire de quatre heures sur ses épaules, qui plus est dirigée par David Lean, comparée à Julie Christie, magnifiquement photographiée par Freddie Young et en outre mariée à Robert Bolt, qui avait écrit le personnage spécifiquement pour elle. Je me demande d'ailleurs ce que l'Amérique a pu penser d'elle à cette époque, car elle illumina la cérémonie de son humour, de sa robe et de son excentricité, peu avant de faire le sel de la presse à scandales. Enfin, Jane Alexander fut quant à elle la nomination surprise de la soirée, puisque après avoir été recalée dans la catégorie "jeunes révélations" aux Globes, on se souvint qu'elle venait de triompher à Broadway un an plus tôt pour le même rôle, après plus de 500 performances et un Tony du second rôle à la clef, si bien que la nomination de James Earl Jones et le buzz autour d'une romance peut-être encore controversée à l'époque entraînèrent un regain de visibilité pour son personnage d'épouse dévouée, de quoi coûter leurs nominations à Melina Mercouri, sans doute la plus attendue parmi les déçues, et Faye Dunaway, dont le statut de superstar ne réussit pas à sauver son film d'un assassinat en règle par la critique. Sur ce, qui va rester dans ma propre liste?

Je retire:

Jane Alexander - The Great White Hope: Le grand problème de cette performance, c'est que l'héroïne est tellement lasse et déprimante que je passe mon temps à me demander si c'est bien joué dans un cadre restreint, ou simplement inexpressif jusqu'à l'ennui. Les qualités qui jaillissent de temps à autres montrent évidemment que le rôle est parfaitement compris, l'actrice commençait d'ailleurs à le connaître sur le bout des doigts, mais ce qui impressionna visiblement sur scène paraît beaucoup trop fade à l'écran pour séduire. Dans le détail, on notera néanmoins que Jane Alexander fait une apparition sensationnelle en riant, avec beaucoup de classe, qu'elle sait bien prendre l'air inquiet quand le manager de son partenaire lui fait remarquer qu'elle est blanche, qu'elle tente toujours de réagir même en arrière-plan et qu'elle sait regarder un adversaire d'un œil très froid quand elle se fait humilier, quitte à ce qu'on la voie peut-être un peu trop jouer, littéralement, même si tout est bien mis en place. Mais très vite, elle a l'air de s'ennuyer ("Along with you"), comme si elle était trop désespérée trop tôt, ce qui est sans aucun doute fidèle à l'esprit du personnage mais nuit à l'émotion qu'elle devrait susciter, au prix de répliques très monotones qui donnent l'impression que c'est l'actrice qui n'y croit plus vraiment, à peine l'héroïne lancée. En tout cas, c'est ce qu'on ressent dans la scène de l'interrogatoire où certes, deux ou trois sourires montrent qu'elle ne se laisse pas démonter, mais où son charisme est constamment limité par la présence de l'inquisiteur. On la sent alors prête à pleurer, déjà désarmée, ce que demande justement le scénario mais qui ne colle qu'à moitié à la psychologie du personnage, qui jusque là n'avait précisément honte de rien, l'actrice s'étant d'ailleurs fait un plaisir d'affronter les questions avec un grand naturel pour ne jamais remettre en cause son histoire d'amour: "I'm not ashamed of wanting him for a lover". Les pleurnicheries sont d'autant plus dommage qu'elle met fin à l'entretien avec un sourire machiavélique afin de choquer l'assemblée par quelques mots vulgaires. Les moments d'intimité sont quant à eux assez pâles, et seule la toute fin lui permet enfin de se mettre en colère, les yeux rougis, bien que ça arrive un peu trop tard pour intéresser. En définitive, la performance n'est sans doute pas si mal jugée que ça, mais cette épouse dévouée et déprimée ennuie, voilà la triste vérité.


Ali MacGraw - Love Story: Surprise, Love Story n'est pas le film abominable dont on m'avait tant parlé, ni le chef-d'oeuvre que les grognasses du lycée présentaient comme leur film préféré de tous les temps (mais je n'avais aucun doute là-dessus!), c'est en réalité une histoire simple assez bien filmée qui se laisse regarder le temps qu'il faut avant de retomber dans les oubliettes. Autre surprise, Ali MacGraw n'a rien de la nunuche que les admiratrices de l'oeuvre me faisaient craindre, puisqu'elle déborde au contraire de personnalité, si bien qu'on s'intéresse à elle dès son entrée en scène, au risque toutefois de trouver son dialogue de séduction d'un conformisme aberrant: "Tu es riche et stupide." "Non, je suis pauvre et futé." "Non c'est moi!" "Non c'est moi! La preuve, je ne t'inviterais même pas à prendre un café!" "C'est bien pour ça que tu es stupide!" Au secours! Quoi qu'il en soit, elle ne se démonte jamais et garde une personnalité dominatrice qui lui permet de gagner le duel du charisme face à Ryan O'Neal, mais lui fait perdre le match de l'interprétation puisque c'est bel et bien son partenaire qui évolue, et a le plus d'émotions à jouer. Ali MacGraw n'a quant à elle que la séquence finale pour vraiment émouvoir, mais malheureusement ça ne fait ni chaud ni froid, non que ce soit mal joué, mais parce que ça manque un peu de relief. Il faut dire que l'héroïne veut constamment rester forte même en plein drame, au point de finir par agacer, d'autant qu'elle jure comme un charretier et que les cent quatre-vingts occurrences des mots "bullshit", "goddam" et consorts tapent rapidement sur les nerfs. Mais dans l'ensemble, ce n'est pas une mauvaise performance, qu'on se mette bien d'accord; c'est surtout que ce n'est pas ma tasse de thé et qu'aucun des personnages ne m'intéresse vraiment, malgré la forte présence de l'actrice. Et puis, quelques maladresses dans la façon de jouer la colère sont également à relever, ce qui ne renforce évidemment pas mon intérêt pour cette composition, même si rien d'alarmant dans l'absolu.


Carrie Snodgress - Diary of a Mad Housewife: Curieusement, le film a bonne réputation même si pour moi ce fut une purge que je ne souhaite pas m'infliger une troisième fois, ce qui est néanmoins dommage car la performance est réussie. En fait, l'actrice a elle aussi du charisme à revendre, ce qu'on ressent dès la longue ouverture où elle s'habille, l'air blasé, sous les humiliations de son mari. D'ailleurs, même lorsqu'elle salue les gens en ville, on sent constamment la femme intelligente coincée dans une vie qu'elle ne mérite pas, et l'actrice garde un petit air supérieur qui lui sied bien, et lui permet de captiver, y compris lorsqu'elle se lâche un peu en boîte de nuit où elle n'a besoin que d'un "no" musical et appuyé pour donner envie d'en savoir plus. Le plus important, c'est qu'elle ne cherche jamais à se mettre en valeur: elle a conscience de la dimension très quotidienne du film et ne fait rien pour plaire ou pour prendre de grands airs. Elle est ainsi victime mais se fiche un peu de ce qu'on pense d'elle, au point de ne jamais paraître sous son jour le plus agréable, et c'est tant mieux. Mais ça ne veut pas dire qu'on ne ressent rien pour elle, sachant qu'elle a au contraire un petit côté touchant dans son ennui, lorsqu'elle tente de sourire en s'excusant, en servant le café, ou lorsqu'elle prend une voix plus hésitante, plus enfantine, quand son mari la surprend à essayer de se faire plaisir et de trancher avec la banalité. Par contre, son exaltation est parfois trop forcée pour y croire vraiment: lorsqu'elle découvre la vue chez son amant, ses réactions et descriptions enthousiastes sont toutes mécaniques. Peut-être est-ce pour le comique de situation, afin que l'amant commence à se demander s'il a bien fait de l'amener chez lui. Mais même, de la part d'une femme si blasée, ces réactions sonnent un peu étrange. On retrouve en tout cas un je-ne-sais-quoi de touchant, avec sa voix rauque, lorsque son amant la déçoit, et même dans sa manière de se composer un visage hautain lors du gros plan final en pleine séance de thérapie. Dans l'ensemble, c'est donc une bonne performance à laquelle je n'ai pas de reproches particuliers à faire, d'autant que l'actrice maintient constamment l'intérêt alors que je hais le film. Mais c'est bien là le problème: le film m'exaspère absolument et ne me donne pas envie de garder l'actrice dans ma sélection. A vrai dire, je préfère même Mommie Dearest du même réalisateur et non, je ne suis pas ironique. Quoi qu'il en soit, Carrie Snodgress n'a nullement démérité, c'est l'essentiel.  


Ma sélection:

Glenda Jackson - Women in Love: Comme je le disais plus haut, il y a nécessairement quelque chose qui plait quand on regarde Glenda Jackson dans un film: le physique singulier, la voix grave, le charisme et ces femmes fortes et intelligentes dont elle s'est fait une spécialité, voilà autant d'éléments qui attirent et séduisent, quelle que soit l'interprétation en tant que telle. Dans le même temps, ce sont ces mêmes éléments qui limitent la créativité de l'actrice: dans bien des cas, j'ai constamment l'impression que ses personnages sont exactement les mêmes d'un film à l'autre, et que la dame cherche trop rarement à les différencier du précédent, se contentant d'étaler son charisme sans apporter de véritables nuances émotionnelles, ou attendant l'extrême fin d'une histoire pour émouvoir un minimum (Marie Stuart, A Touch of Class), à l'exception de Sunday Bloody Sunday qui reste à mon avis sa plus grande réussite. En cela, Gudrun Brangwen recoupe les grandes qualités de l'actrice qui accrochent le regard en moins d'une seconde, mais comme pour la plupart de ses compositions, on ressent difficilement quelque chose pour l'héroïne, comme si le jeu restait peut-être un peu trop en surface et donnait le sentiment qu'il manque quelque chose de plus profond. Mais Gudrun reste un personnage si particulier que les défauts en question semblent plutôt bien adaptés à l'exercice, la dame, indépendante, se plaçant toujours au-dessus de ses pairs pour les observer avec ironie. Une trop grande dose d'émotions serait alors très mal venue, et le talent de l'actrice est justement de développer le personnage à partir de cette seule et unique caractéristique. Elle présente alors un personnage assez désagréable, dont elle ne cherche jamais à gommer le caractère antipathique, mais qu'elle fait parfois sortir de sa froideur pour révéler une exaltation qui sied bien à une artiste, d'autant plus à une artiste qui a besoin de violence pour créer, et de provoquer son partenaire pour se sentir à l'aise avec ses sentiments, quitter à aller jusqu'au tragique. Avant ça, elle prend manifestement plaisir à critiquer la société avec sa sœur, à s'amuser dans la neige et à danser frénétiquement lors d'un ragtime improvisé, ou devant des vaches écossaises (!), avec toujours beaucoup d'indépendance et de fierté. A la fin, elle est peut-être trop froide et trop supérieure pour créer une once de sympathie, mais elle captive en permanence. Reste à savoir si j'aime vraiment son interprétation ou si c'est juste son charisme d'actrice qui me plait.


Sarah Miles - Ryan's Daughter: L'un des grands mystères de la décennie, c'est pourquoi tant de haine envers Ryan's Daughter et son actrice principale? Certes, le film est un peu long pour une telle romance, mais lorsqu'on atteint un tel degré de soin et de précision dans la mise en scène, je ne comprends pas pourquoi crier au scandale plutôt qu'au chef-d'œuvre. De même pour l'actrice, à qui l'on reproche à la fois de se laisser diriger par le réalisateur et de trop bien jouer, ce qui est quand même un peu fort alors qu'elle est justement très bien distribuée dans le rôle, auquel elle apporte toute sa sensibilité et une forte dose d'émotions qui touchent et maintiennent constamment l'intérêt dans les quatre heures que dure le film. Ce qui frappe en priorité, c'est la notion de désir qu'elle varie allègrement, depuis l'exaltation virginale qui la pousse dans les bras d'un Robert Mitchum superbement réservé, face à qui elle joue bien les jeunes filles jusqu'à la conversation sur les devoirs conjugaux avec le prêtre; au désir érotique lorsqu'elle tombe réellement amoureuse de l'officier et transpire sur la mousse des sous-bois; en passant par la frustration sexuelle qui provoque en elle une colère contenue qui explose enfin lors des confessions au prêtre sur la plage, alors que l'héroïne reste très digne et sincèrement attachée à un époux qu'elle ne veut pas blesser. D'ailleurs, la complicité qu'elle tisse avec lui, malgré leur mésentente charnelle, reste magnifique, surtout après la séquence du lynchage public, plus angoissante que jamais. Toutes ces émotions sont vraiment très bien jouées et l'actrice captive jusqu'à la dernière minute, aussi est-il objectivement difficile de lui reprocher quoi que ce soit, sinon que le rôle est peut-être un peu conventionnel, et certainement moins moderne que les autres femmes amoureuses de la même année, ce qui en rebute sans doutes certains. Mais le jeu de Sarah Miles est parfaitement adapté à l'exercice, et de mon côté, on ne trouvera que des louanges. Après tout, si nous aimons tous Julie Christie dans Doctor Zhivago, je ne vois pas pourquoi nous n'aimerions pas Sarah Miles dans La fille de Ryan, la seconde allant encore plus loin dans la sensualité.


Faye Dunaway - Puzzle of a Downfall Child: Quand on pense à Faye Dunaway, on parle évidemment des grands chefs-d'œuvre du siècle pour lesquels les Oscars la distinguèrent officiellement, mais on entend trop rarement de citations pour Puzzle of a Downfall Child, à la fois une énorme réussite technique et l'une des meilleures performances de la star, plus photogénique que jamais. On a d'ailleurs dit qu'elle s'est totalement investie dans le rôle, et rien n'est plus vrai, tant elle rend justice à ce personnage complexe de top model ravagée par les excès de la célébrité, et complètement larguée aux moments des confidences. En outre, le rôle est vraiment difficile car on a bel et bien affaire à un puzzle, qu'il faut remettre en ordre pour y voir clair tout en triant le vrai du faux puisque Lou est aussi une menteuse compulsive quand ça l'arrange. Alors, si on recolle les morceaux, ça donne quoi? Une interprétation parfaite d'une grande lisibilité, depuis la jeune fille timide qui fait ses premiers pas dans une agence de mannequins, à la femme brisée se présentant littéralement à nu, sans aucun maquillage, pour enregistrer son récit, en passant par la star adulée en pleine confusion sentimentale, qui plus est traumatisée par un ancien viol et qui cherche des réponses auprès de tout un chacun, qu'il s'agisse des gens de mode, des psychiatres de l'asile ou du pêcheur chinois de Long Island. En toute honnêteté, l'actrice excelle dans tous les registres, se montrant tour à tour douce, capricieuse, séductrice, agressive, blessée, perdue, lumineuse et soumise au regret, cherchant toujours du réconfort quitte à harceler des gens au téléphone, et ne sachant jamais ce qu'elle veut, au point de se brouiller avec à peu près tout le monde. Son dernier regard sur la plage est sublime, et sans doute le plus sincère du film, de même que voir l'actrice aussi naturelle dans les scènes de confidences illumine son talent d'une lueur nouvelle que je ne lui connaissais pas dans cette partie de sa carrière. Je ne sais pas trop comment parler de ce rôle plus en détails, c'est trop riche et complexe pour être condensé et ça mériterait un article spécial. Mais on touche vraiment à la perfection.


Jennie Linden - Women in Love: A l'inverse de sa célébrissime partenaire, Jennie Linden n'est pas du genre à foudroyer le spectateur en n'ayant qu'à apparaître à l'écran, mais elle bénéficie d'un personnage plus conventionnel qui lui permet d'avoir plus de grain à moudre au niveau des émotions, et par-là même d'avoir un jeu plus démonstratif grâce auquel on ressent davantage de choses pour Ursula que pour Gudrun. En réalité, beaucoup préfèrent Gudrun, plus cynique et plus moderne dans sa façon de penser, alors qu'Ursula semble absolument satisfaite de se ranger après avoir batifolé hors des liens du mariage dans les champs, et sa dernière réplique révèle justement qu'elle n'est pas si ouverte d'esprit que ça, et a bien du mal à concevoir ne serait-ce qu'une once d'originalité en matière d'amour. Les défauts du personnage n'en font pas un rôle ingrat pour autant, car avant de s'ancrer dans de telles certitudes, Ursula a tout loisir de s'exprimer avec force émotions, soit un véritable challenge pour l'actrice. On pense notamment à sa grande scène dans les fougères où Linden est impresionnante de justesse dans sa colère envers Alan Bates, avant de bien marquer son amour et son désir lors de la réconciliation qui suit, en particulier dans son regard devant le feu de cheminée où elle sait ne pas rendre niaise une réplique telle que: "Because we love each other!" De toute façon, l'actrice n'a pas attendu ce moment-là pour se montrer plus forte que le personnage ne le laisserait croire de prime abord, d'une part parce qu'elle est également charismatique à sa manière, mais surtout parce qu'elle ne se fait jamais manger par Glenda Jackson, ni par sa rivale sur le cœur d'Alan Bates, la sublime Eleanor Bron. Je suis donc totalement séduit et ne vois pas ce qu'on peut bien reprocher à l'actrice même en admettant que ses partenaires remportent plus de suffrages. A la réflexion, Jackson hérite du personnage le plus intéressant, Linden du personnage le plus émotif, et les deux sont beaucoup trop complémentaires dans leurs différences pour qu'on puisse justifier l'une des nominations sans l'autre.


Joanne Woodward - WUSA: Disons le franchement: WUSA est un film raté, qui passe totalement à côté de la critique politique qu'on entendait faire, et où le cynisme de Paul Newman manque cruellement de subtilité. Pourtant, c'est bien dans ce fiasco, qui se laisse toutefois très bien regarder, que se niche l'une de mes performances préférées de 1970, en la personne de Joanne Woodward, l'actrice étant de fait le centre de gravité émotionnel du film, et la principale raison d'y jeter un coup d’œil malgré tout. Son personnage est néanmoins un rôle à clichés: la pute au grand cœur, tiens donc! Mais celle-ci a tant de personnalité qu'elle se démarque facilement, révélant par ses gestes une certaine fragilité qui perce sous son charisme de façade, bien qu'elle tente malgré tout de dissimuler de son mieux sa nervosité. En tout cas, Woodward joue bien sur des manières et un phrasé vulgaires, en n'en faisant jamais trop pour éviter de donner l'impression qu'elle joue: le résultat est alors naturel, qu'elle mâche son chewing-gum sans distinction ou qu'elle sorte le grand jeu d'un vocabulaire à la "Yeah, buddy". Par ailleurs, Geraldine est dotée d'une vraie présence d'esprit, et elle touche justement parce qu'elle a du mal à comprendre le cynisme du héros, à qui elle ose parler franchement avec juste ce qu'il faut d'incompréhension dans le regard. L'actrice s'impose en fait comme le véritable centre moral du film, de quoi renforcer l'intérêt qu'on porte à ses déboires sentimentaux, entre mélancolie et trouble sincère lors d'une première joute avec Newman. Elle est même d'autant plus émouvante qu'alors qu'on la sent vivement blessée et prête à craquer, ça ne l'empêche nullement de conserver tout son charisme et de rassurer le personnage d'Anthony Perkins. La séquence finale est encore très bien jouée, sans oublier d'être logique compte tenu des derniers événements, ce qui achève de rendre la performance vraiment marquante. Quoi qu'il en soit, le rôle a beau ne pas trop sortir des sentiers battus, ça reste assez développé pour qu'un personnage devant traditionnellement soutenir le héros ait ici une trajectoire propre. D'ailleurs, si l'on ne prend que la dimension sentimentale, le film est une réussite, et le charisme et le jeu de l'actrice ne sont pas pour rien dans cette impression. 

En réalité, établir ma propre liste n'a guère été difficile pour 1970: les cinq héroïnes en question sont les seules pour lesquelles j'ai ressenti quelque chose, et même si l'année en générale n'est pas des plus éblouissantes (encore que la sélection officielle soit loin d'être mauvaise), il est somme toute satisfaisant de n'avoir pas à chercher midi à quatorze heures pour avoir à départager de multiples actrices. Ma lauréate:

Faye Dunaway - Puzzle of a Downfall Child

Sans grande surprise, c'est bien la performance la plus complexe qui l'emporte cette année, mais j'avoue avoir eu un moment d'hésitations avec Sarah Miles, que j'aime beaucoup et que je trouve vraiment émouvante dans son rôle de facture plus classique. Ironie du sort, les deux entreront encore en concurrence quelques années plus tard bien que la première soit encore appelée à remporter les suffrages... Peut-être m'en retournerai-je vers la seconde en 1970? Je ne sais pas, j'avoue que Faye Dunaway surpasse vraiment ses concurrentes avec Puzzle, et une victoire pour l'actrice à ce moment-là fait tellement sens: d'un côté son aura de superstar et son physique à tomber par terre rappellent les grandes actrices du Golden Age, et de l'autre, son rôle complexe fait entrer de plein fouet dans la modernité, comme si elle assurait en quelque sorte la liaison entre deux époques. Je reste sur Puzzle dans l'immédiat, mais comme je le laissais entendre récemment, attribuer des victoires m'intéresse finalement moins que de déterminer mon top 5 chaque année. Pour vous donner une idée du classement, toutefois, ça donnerait Faye Dunaway à la première place, suivie de Sarah Miles pour sûr. Concernant les Women in Love, je ne sais plus vraiment laquelle des deux je préfère, chacune repassant devant l'autre au gré des séquences. Je laisse simplement Joanne Woodward à la cinquième place car elle est la seule à ne pas figurer dans un chef-d'œuvre, sans compter que son rôle est un peu plus conventionnel que les autres.

Sur ce, le classement de Sylvia Fowler, à propos des performances:

dignes d'un Oscar: Faye Dunaway (Puzzle of a Downfall Child): Sarah Miles (Ryan's Daughter): voir ci-dessus.





dignes d'une nomination: Glenda Jackson & Jennie Linden (Women in Love): voir ci-dessus. Angela Lansbury (Something for Everyone): c'est elle qui s'est le plus approchée d'une nomination avant ma découverte de Woodward, et il faut dire qu'elle est réellement amusante en comtesse autrichienne aux airs de diva excentrique à la mélancolie poétique, qui n'oublie pas de divaguer divinement. Mais en définitive, elle me fait plus sourire que rire aux éclats. Joanne Woodward (WUSA): voir ci-dessus.


dignes d'intérêt: Julie Andrews (Darling Lili): il y avait sans doute moyen de faire plus drôle ou plus tragique, mais l'actrice reste dans un entre-deux confortable qui lui permet de se reposer sur sa voix et son charisme de star: pas exigeant, mais indéniablement plaisant, et ce rôle fait bien la transition dans sa carrière entre la gentille dame qui chante avec les enfants et la femme plus mature qui se dévêtit sur scène. Jacqueline Bisset (The Grasshopper): une performance qui brille par sa discrétion, portée par une actrice très à l'aise pour faire naître l'ennui, la mélancolie, le regret et une certaine dose d'agacement dans ses regards. Dommage que le rôle soit un peu convenu dans un film qui laisse grandement sur sa faim. Bette Davis (Connecting Rooms): dans une histoire qui rappelle Separate Tables sans en avoir le rythme, Bette Davis se révèle très émouvante dans sa relation à Michael Redgrave, surtout à la fin. Mais on regrettera tout de même certains tics très davisiens, surtout au niveau des expressions faciales, qui se repèrent trop facilement dans un film aussi simple. Sandy Dennis (The Out-of-Towners): Oh-my-god elle est à mourir de rire dans sa nonchalance de bobonne à la ville. Elle plus elle reste calme, plus elle apparaît comme le contrepoint nécessaire à la nervosité de Jack Lemmon pour que leur complicité fonctionne. Ali MacGraw (Love Story): voir ci-dessus. Melina Mercouri (Promise at Dawn): oui, oui, elle est bien, très charismatique et tout, et on ne risque pas de la louper, mais on a constamment l'impression qu'elle est trop présente, uniquement là pour éblouir en tant actrice, et que le personnage est beaucoup plus autocentré qu'elle ne voudrait le faire croire. Le fait que le rôle ait été cousu sur mesure pour elle par son mari n'est sans doute pas étranger à ce sentiment de phagocytose. Geneviève Page (The Private Life of Sherlock Holmes): je ne peux pas dire que je sois excessivement fan, et peut-être est-elle trop évaporée pour moi au début, mais elle est tout de même aussi charmante qu'amusante, surtout quand elle embrasse le héros qui accepte finalement de lui rendre service. Carrie Snodgress (Diary of a Mad Housewife): voir ci-dessus. Barbra Streisand (The Owl and the Pussycat): la performance manque sans doute un peu de profondeur, et ce personnage un brin exaspérant est parfois assez surjoué, mais ça n'empêche nullement l'actrice d'être drôle et charismatique, et de dominer l'ensemble du film. Raquel Welch (Myra Breckinridge): je n'aurais jamais pensé pouvoir dire du bien de Raquel Welch, qui plus est dans ce film, d'autant que je n'avais jusqu'alors perçu la dame que par le prisme de sa fonction première, à savoir décorer très joliment les tapis rouges. Mais il faut bien se rendre à l'évidence: elle est ici très drôle et a beaucoup de présence à l'écran, même dans les passages les plus vulgaires, et elle tient même tête à Mae West qui ne l'a pourtant pas ménagée sur le tournage. Reste que ça fait toujours un peu bizarre de la classer dans la même catégorie que Bette Davis et Julie Andrews, et plus haut que Liv Ullmann et Julie Christie, mais le divertissement est bien là.


sans intérêt: Jane Alexander (The Great White Hope): voir ci-dessus. Candice Bergen (Getting Straight): on ne peut vraiment pas dire que ce soit une performance marquante. On retiendra juste qu'elle est blonde, qu'elle grimace un peu en certaines occasions, et qu'elle est totalement insipide. Peut-être serait-elle plus à sa place comme second rôle, aussi. Anna Calder-Marshall (Wuthering Heights): certes, elle joue, mais elle ne parvient à intéresser ni à son personnage, ni à son film. D'ailleurs, pourquoi diable faire un remake d'une oeuvre aussi prestigieuse si c'est pour la filmer à la manière d'un téléfilm grisonnant? Leslie Caron (Madron): techniquement c'est bien joué, mais elle est coincée dans un assez mauvais film qui rend son personnage de nonne dans le désert un peu caduque. Disons qu'on était en droit d'attendre plus d'une association aussi étonnante, bien que l'actrice soit sincèrement bonne dans ses diverses émotions, et donne une certaine épaisseur au personnage. Julie Christie (In Search of Gregory): son charisme et sa beauté scotchent une fois de plus sans qu'elle ait besoin de faire quoi que ce soit, mais en toute honnêteté, ni son film ni sa performance n'étaient destinés à rester dans les annales. Eva Gabor (The AristoCats): le cas des performances vocales est toujours un peu particulier, surtout quand il s'agit de jouer une gentille personne, mais j'avoue avoir été un peu déçu par la voix rauque de l'actrice, qui n'a pour le coup rien d'une duchesse, pas même dans ses intonations. Mais peut-être que mes attentes étaient trop hautes après avoir grandi avec la version française, d'autant que je suis très exigeant envers ce film à travers la relation de Berlioz à sa mère. Goldie Hawn (There's a Girl in My Soup): très désabusée au début, puis hilare quand elle s'enfuit avec le maillot de bain de Peter Sellers sur la plage, mais dans l'ensemble elle n'est ni aussi drôle et lumineuse que dans d'autres films, comme l'excellent Butterflies Are Free. Sue Lyon (Four Rode Out): elle grimace pas mal pour montrer de la dureté, et elle n'est de toute façon aucunement intéressante dans ce mauvais western. Shirley MacLaine (Two Mules for Sister Sara): une performance pour le moins étrange qui n'est ni vraiment drôle, ni vraiment sérieuse alors que cette fausse nonne égarée dans l'empire de Clint Eastwood méritait un traitement plus précis. Paradoxalement, son personnage étant plus ambigu, elle reste beaucoup plus divertissante que Leslie Caron, sans compter qu'elle a la chance d'être dans le meilleur film, et soutenue par une excellente photographie. Liza Minnelli (Tell Me That You Love Me, Junie Moon): une performance assez similaire au Sterile Cuckoo, mais nettement moins captivante. Et malgré sa présence et sa capacité à faire un peu d'humour malgré sa situation, des tics très minnelliens et une scène finale extrêmement ratée finissent par plomber tout son travail. Joanna Shimkus (The Virgin and the Gypsy): elle n'est sincèrement pas mauvaise, mais difficile de marquer les esprits dans du Lawrence l'année de Women in Love, d'autant qu'elle se fait manger en une scène par Honor Blackman. Marlo Thomas (Jenny): apparemment, l'actrice a pris ce personnage de mère célibataire pour briser son image trop sage de la série That Girl, mais force est de reconnaître qu'elle a tendance à garder la bouche entrouverte, d'où l'impression qu'elle minaude même si elle sait se montrer déçue. Et elle se fait elle aussi dépasser par le second rôle féminin. Liv Ullmann (Cold Sweat): elle a le mérite de réagir et de confronter son mari même dans les pires situations, mais qu'est-elle allée faire dans cette galère?


perdues dans les limbes horrifiquesJoan Crawford (Trog): une performance impossible à juger tant Crawford est en décalage avec la tonalité du film. En effet, sa conscience professionnelle aiguisée l'a visiblement poussée à jouer comme dans Mildred Pierce, mais à quoi bon se montrer aussi sérieuse quand on donne la réplique à un singe préhistorique (!) traumatisé par l'extinction de ses amis les dinosaures (!), qui en plus tombe amoureux de la blonde idiote (!) et qui ennuie pendant deux heures avant de verser du sang (!)? Remarque, cette approche d'un tel navet permet à l'actrice de non seulement dominer le tout, mais également de le rendre un poil plus jouissif qu'il ne l'aurait été autrement, même si ça reste confondant de nullité soporifique. Mais bon, ce dernier regard ému et torturé comme dans le finale d'Humoresque est à mourir de rire dans un tel contexte, et c'est déjà ça de pris! Miriam Hopkins (Savage Intruder): là par contre, c'est totalement raté, et rien ne fait plus mal au cœur que de voir mon idole flinguer sa carrière en se compromettant de la sorte dans son dernier film, qu'elle n'arrive même pas à transformer en plaisir coupable. Et vraiment, cette variation de Norma Desmond qui parle toute seule, et à moitié alcoolisée, à ses mannequins de cire est hélas plus pathétique qu'autre chose. A croire que Bette Davis a fait du vaudou en 1970 pour pousser ses deux rivales à accepter ce genre de projets! Ingrid Pitt (The Vampire Lovers): heureusement, ce mauvais film d'horreur est quand même bien moins pire que les deux navets sus-cités, mais concrètement, que fait l'actrice à part draguer des jeunes filles débiles dont le sang a quantitativement moins de globules rouges qu'elles n'ont de neurones (c'est-à-dire trois)?


à découvrir: les actrices (Lovers and Other Strangers), Ingrid Bergman (A Walk in the Spring Rain): Ruth Gordon (Where's Poppa?), Julie Harris (The People Next Door), Barbara Hershey (The Baby Maker), Lauren Hutton (Pieces of Dream), Anne Jackson (Zig Zag), Barbara Loden (Wanda), Susan Sarandon (Joe), Stella Stevens (The Ballad of Cable Hogue), Shirley Stoler (The Honeymoon Killers), Barbra Streisand (On a Clear Day You Can See Forever), Elizabeth Taylor (The Only Game in Town), Tuesday Weld (I Walk the Line)


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