dimanche 31 mai 2015

La véritable histoire... La Vallée des Rois.

Pour finir le mois en beauté, une petite histoire exotique de très bon goût, produite par la MGM.

"Mon père, je suis tourmentée...."

"... Voilà. J'aime ces deux hommes mais n'arrive
pas à me décider avec qui passer la nuit."

"Allons, du nerf, ma fille! Il faut savoir faire des choix!"

"Bon, vous savez quoi? Je vous laisse le temps de
me décider et je reviens. A toute!"

"Hey! Salut beau gosse!"
"Salut! Tu veux venir voir ma nouvelle maison?"
"Ouais, carrément!"

"Youhou! Les garçons! Je me suis enfin décidée pour...
... Oh!"




mercredi 27 mai 2015

En ce joli mois de mai.

Bonsoir,

J'ai fini de faire mes choix pour les Orfeoscar 1930, et ceux qui ont accès à mon profil Imdb ont pu les découvrir en exclusivité, mais il me reste à présent à les justifier, et dieu sait si l'article me prend du temps à écrire. Alors en attendant, voici quelques réflexions sur les films qui m'ont le plus marqué récemment.


The Cossacks, de Clarence Brown et George Hill (1928)

D'abord réalisé par George Hill, puis presque intégralement retourné par Clarence Brown à la demande du studio, The Cossacks vient de s'ajouter à la liste déjà très longue de chefs-d’œuvre de 1928, certainement la meilleure année de cinéma pour moi, avec La Passion de Jeanne d'Arc, The Wind, The Crowd, The Last Command, The Wedding March, A Woman of Affairs, The Mysterious Lady, The Man Who Laughs, The Patsy, The Docks of New York, Street Angel, Our Dancing Daughters et Sadie Thompson. En effet, le film est très excitant, regorgeant de somptueux costumes, de beaux décors turcs, de cascades impressionnantes lors des cavalcades et d'effets spéciaux fort crédibles, et l'histoire se suit avec grand intérêt entre comédie maritale et guerre dans la steppe, au point qu'on ne fera qu'un unique reproche à cet ensemble divertissant à souhait, à savoir sa tonalité clairement antiféministe, quoique Renée Adorée ait assez de répondant pour faire passer la pilule. Malgré tout, le plus bel atout du film reste la performance d'Ernest Torrence en patriarche bourru, un morceau de bravoure si comique qu'il est d'ores et déjà hors de question d'envisager ne serait-ce qu'un embryon de concurrence pour mon Orfeoscar du meilleur second rôle masculin 1928. 8/10.


Taking Off, de Milos Forman (1971)

Possiblement le film qui a le mieux vieilli sur l'ensemble des 70's, et dont le message résonne encore avec clarté aujourd'hui. En effet, l'histoire est absolument captivante, en étant judicieusement centrée sur un monde de parents bien rangés qui n'osent s'avouer leur furieuse envie de retrouver l'intrépidité de leur vingt ans tandis que leurs enfants s'évaporent dans la nature. Chaque séquence vaut ainsi son pesant d'or, à commencer par une première partie sur l'inquiétude des parents mêlée à l'histoire d'une jeune fille déterminée à passer une audition, avant de voir les adultes parfois prêts à céder à la tentation lors des recherches et des réunions de groupe, le tout pour déboucher sur la séquence la plus drôle de l'univers lors de la (re)découverte de certaines substances illicites.

Pour lier tout ça, le montage est absolument éblouissant, accentuant souvent le comique d'une situation, comme Lynn Carlin se retournant, à moitié ivre, souriant à son mari sans avoir vu la scène ridicule à laquelle celui-ci vient d'assister dans leur chambre d'hôtel; et le film est également porté par une bande-son à tomber par terre, entre la jolie ballade hippie de la future Kathy Bates sur la fin de l'enfance, et le rock enflammé de Tina Turner qui vient faire là un plaisant caméo, à l'époque où elle était encore bien coiffée. Quant aux performances, rien ne sert de mentir, chacune est sensationnelle, notamment du côté de Buck Henry, Audra Lindley et Paul Benedict, sans qu'aucun ne parvienne cependant à égaler la prodigieuse Lynn Carlin, dont l'interprétation est si énorme que le film vaudrait le coup d’œil rien que pour elle. Mention spéciale, également, à la grosse dame en jaune lors de la séquence la plus mémorable. 9/10.


Young Frankenstein, de Mel Brooks (1974)

Cloris Leachman, Teri Garr, Madeline Kahn, et des messieurs célèbres que je ne connaissais que de nom, sont dans un château. Que se passe-t-il? Pas grand chose, malheureusement. En effet, le film m'a perdu au bout de vingt minutes à cause d'un énorme problème de rythme, puisque le scénario n'est en fait qu'une succession de blagues douteuses devant lesquelles on tente de se forcer à sourire au début, pour se mettre dans l'ambiance, avant de réaliser que ça n'en vaut même pas la peine. Sans mentir, les chevaux qui hennissent à la moindre mention de Frau Blücher? Cloris Leachman qui s'excite sur son violon? Teri Garr qui propose à Gene Wilder de se rouler avec elle dans le foin sans qu'ils aient été encore présentés? Peter Boyle aussi captivant qu'une armoire suédoise? Madeline Kahn en diva capricieuse obsédée par son maquillage? Tout ça aurait pu être drôle mais chaque blague tombe constamment à plat, et aucun des acteurs n'est jamais parvenu à m'arracher le moindre rire. Dommage, car les décors et la photographie en noir et blanc sont pour leur part alléchants, et donnent une idée de ce que cette parodie aurait pu être. 4/10.


Mrs. Soffel, de Gillian Armstrong (1984)

Un film qui a assez mauvaise réputation, certains lui reprochant une certaine artificialité et un rythme trop lent, mais que j'ai pour ma part plutôt bien aimé. C'est en effet très bien filmé, à grand renfort de décors, de costumes et d'images de qualité, et l'histoire, loin de m'avoir ennuyé, m'a au contraire donné une constante envie de suivre l'évolution d'une héroïne coincée dans une vie modèle insipide, et prête à tout abandonner pour trouver l'exaltation qui lui fait cruellement défaut chez elle. La première partie, centrée sur la montée du désir envers le prisonnier, reste captivante et bien détaillée, tandis que la seconde, plus aventureuse, comporte assez de rebondissements pour divertir à chaque instant. Après, ça n'est pas un chef-d’œuvre pour autant, mais ça reste un film aimable qui ne sera pas une perte de temps s'il vous prend l'envie de vous y adonner. Atout suprême: Diane Keaton, excellente dans le rôle dramatique où je la préfère, rôle où elle sait comment s'effacer derrière une héroïne d'abord terne mais jamais dénuée de charisme, puis illuminée par de petites touches d'émotion et d'autorité qui la nuancent à merveille. Voilà en tout cas une bonne alternative aux fermières des grandes plaines qui ont curieusement dominé la catégorie des meilleures actrices aux Oscar 1984. 6/10.


La historia oficial, de Luis Puenzo (1985)

Le film argentin le plus célèbre à travers le monde est à la hauteur de sa réputation. Les deux aspects de l'histoire, à la fois une critique politique, d'ailleurs tournée en grand secret avant la chute de la dictature, et un drame intimiste touchant de plein fouet une famille de notables a priori très convenables; sont sans surprise traités avec un soin et une précision toujours parfaits, ne faisant pas l'économie de moments lumineux malgré une tonalité sombre, et les performances d'acteurs sont également précises et mémorables à souhait, en particulier celles d'Héctor Alterio et Chunchuna Villafañe. Malgré tout, c'est bel et bien la légendaire Norma Aleandro qui trône au sommet de l'édifice, grâce à une interprétation qui couvre à peu près tous les registres possibles et imaginables avec toujours beaucoup de charisme et de nuance, au point de s'imposer comme l'une des trois meilleures performances qu'il m'a été donné de voir sur l'ensemble des années 1980. Jusqu'alors, j'ai toujours eu quelque hésitation quant à mon prix de la meilleure actrice 1985: je n'en ai plus. Le film a par ailleurs très bien vieilli. 8/10.


Before Sunrise, de Richard Linklater (1995)

J'avais beaucoup oublié ce film depuis le premier visionnage, et après redécouverte, je n'en reviens pas de réaliser à quel point ça reste incroyablement frais et fascinant, sans jamais accuser ses vingt ans. Sans mentir, ça pourrait sortir aujourd'hui que les personnages seraient toujours aussi justes et adaptés à notre époque, et les réflexions seraient toujours d'actualité. Il est également fort plaisant de se remémorer le brillant des répliques et du scénario, auquel ont beaucoup contribué les deux interprètes bien qu'ils ne soient pas mentionnés dans les crédits, si bien que ce parcours, tout de dialogues subtils et de jolies images de la capitale autrichienne, captive à chaque recoin et n'ennuie pas une seule seconde malgré le caractère somme toute banal de ces personnages. Ethan Hawke et Julie Delpy sont pour leur part toujours aussi bons que dans mon souvenir, mais leurs performances ne sont néanmoins pas l'atout principal d'un film essentiellement très bien écrit. J'avais mis 8/10 la première fois, et je maintiens totalement cette note.


Zwartboek, de Paul Verhoeven (2006)

Allons, un film qui reste à ce jour le plus cher de l'histoire de son pays, élu par les Néerlandais comme le plus grand film batave de tous les temps, ayant fait grand bruit à l'époque de sa sortie en salles entre 2006 et 2007, ayant manqué de peu la nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, et contenant une performance d'actrice que plusieurs cinéphiles que je lis mentionnent comme absolument digne d'une nomination, ça doit être un bon film, non? Eh bien non, précisément. C'est même une œuvre atrocement manipulatrice puisque sous ses airs de film hautement divertissant (en toute honnêteté, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde), ce n'est rien d'autre qu'un ramassis d'âneries en tous genres qu'on pourrait classer en trois catégories.

La première tient à un scénario totalement improbable, qui trop obnubilé par l'idée d'avoir un rebondissement inattendu à chaque séquence en oublie la cohérence du récit et la fidélité à la psychologie de l'héroïne. Ainsi, Rachel voit son unique cachette bombardée? Bof, pas bien grave, j'en avais marre de rester là, de toute façon. Elle voit sa famille se faire fusiller sous ses yeux (ce n'est pas un spoiler, ça intervient dès le début)? Moui, on passe directement à la scène suivante et l'on dirait qu'elle s'en fiche. La voilà empoisonnée à l'insuline? Oh, ce n'est rien, sautons vite du balcon en sachant qu'on sera portée par la foule comme une rock star, au nez et à la barbe du grand méchant. Sa collègue, accoquinée avec les nazis, la soupçonne de quelque chose? Bah oui, je suis une espionne, je pensais que tu le savais (non, ce n'est pas ironique!). Bref, pas la peine de pointer toutes les incohérences sans quoi nous en avons pour la semaine, mais c'est à peu près le même refrain tous les quarts d'heure, ce qui reste assez effarant quand on sait que les scénaristes ont mis plus d'une vingtaine d'année pour pondre une telle histoire!

La seconde, c'est la beauferie crasse consistant à montrer des femmes à poil dès que possible, entre la secrétaire qui se fait prendre par une bonne dizaine de soldats dans les couloirs de l'hôtel au vu et au su de tous, et l'héroïne qui va jusqu'à se teindre le sous-bois en blond vénitien pour se donner l'air germanique, sans même penser à colorer les racines apparentes de ses cheveux... Voyant cela, j'ai regardé le nom du réalisateur pour voir à quel genre de films le type était habitué, tout ça pour découvrir qu'il s'agit en fait de l'illustre metteur en scène de Basic Instinct. Tout s'est alors illuminé d'une lueur nouvelle: à défaut d'avoir Sharon Stone sans culotte, offrons des scènes de nudité gratuites et vulgaires à une pauvre Hollandaise qui attend de percer...

La troisième, et de loin la plus dangereuse, est un ensemble de libertés prises avec l'Histoire, chose qui n'aurait pas été un problème si le scénario avait été bien ficelé, mais qui reste accablante d'indécence dans sa représentation du peuple hollandais pendant la guerre. Le summum, c'est l'attroupement qui se forme pour accueillir en héros l'un des résistants lors des célébrations de la fin de la guerre, avec tous ces gens représentés comme des moutons campant sous les fenêtres de leur idole comme des minettes à un concert de Justin Bieber, et incapables de réagir autrement que de taper dans les mains à chaque mouvement du type qu'ils acclament. Il est vrai qu'après un tel conflit, les gens n'avaient pas d'autres sujets de préoccupation...

Et Carice van Houten dans tout ça? Eh bien la pauvre fait tout ce qu'elle peut pour émerger de la flaque de vomi dans laquelle elle est littéralement plongée pendant trois heures, et il faut reconnaître qu'elle porte le film par son énergie et son aisance à manier plusieurs langues comme si de rien n'était, mais elle est loin de parvenir à sauver son héroïne de ce naufrage scénaristique puisqu'elle ne pense tout simplement pas à suggérer la douleur et le regret d'avoir perdu sa famille, ce qui, malgré l'absence de scène prévue à cet effet, aurait pu être rattrapé lors du premier dialogue suivant cette tragédie. Bref, on fera un geste pour une actrice somme toute dynamique mais le film ne vaut guère plus de 3/10, tout divertissant soit-il. Mes connaissances en cinéma hollandais sont actuellement très limitées, mais j'ose espérer que ce n'est pas réellement le plus grand film de ce pays-là.


A Little Chaos, d'Alan Rickman (2014)

C'est un film qui semble avoir été écrit pour moi, qui n'aime rien tant que dessiner des plans de châteaux et de jardins pour ma future maison, et je dois avouer qu'il y a tant de bons aspects dans cet ensemble que je ne suis pas mécontent du tout d'avoir passé deux heures de ma vie dans le Versailles en construction de Louis XIV. En effet, les décors et costumes sont splendides, la photographie vraiment soignée (les fleurs dans les bois, lors de la promenade, notamment), et la musique reste assez divertissante pour que le tout fasse passer un très agréable moment, et ce d'autant plus que même les coiffeuses et maquilleuses sont à féliciter pour avoir su rendre Matthias Schoenaerts sincèrement séduisant avec ses cheveux longs, et dieu sait si je ne suis précisément pas friand de cheveux longs chez les garçons, en général.

Dommage, néanmoins, que l'histoire ne tienne pas les promesses que la forme laissait présager. En effet, de quoi parle ce film, à la fin? De jardinage ordonné, pour faire ombrage à Angelina Jolie et ses ronces qui se transforment en dragons? Pas vraiment, la question des jardins et de la réussite personnelle s'estompant de plus en plus au fur et à mesure de l'histoire. Est-ce un film d'amour alors? Un soap opera avec rivale jalouse prête à inonder les fondations tout juste posées? En partie, mais alors, pourquoi diluer le propos dans un exposé scolaire sur les grands personnages de la cour à cette époque? Est-ce en définitive un film sur les rapports humains, avec certaines idées peu novatrices mais toujours captivantes, telle l'héroïne, de modeste extraction, papotant d'amour et de remariage avec le roi? Ou alors, la ligne générale est-elle ce fameux secret que renferme Sabine, secret dont la révélation, certainement le clou du spectacle, laisse clairement sur sa faim? Est-ce un parcours psychologique pour aider l'héroïne à se débarrasser de ses démons? En fait, l'histoire tire dans toutes ces directions à la fois, au point que tout ça semble finalement assez confus, dépassant allègrement la petite touche de chaos autorisée pour éclaircir un ensemble trop ordonné.

Il est également dommage que les personnages secondaires, souvent tous l'occasion de créations mémorables et croustillantes, n'apparaissent que le temps d'une scène avant de disparaître comme des pages disgraciés. En effet, chacun a droit à sa vignette pour prendre le contrepied des préjugés historiques qu'on peut avoir sur eux (La favorite n'est pas qu'une mégère, elle est aussi humaine! Le frère du roi n'est pas qu'un cliché homosexuel ambulant, etc.), mais chaque apparition a l'air sincèrement plaquée, sans vraiment apporter un regard nouveau sur l'intrigue ou sur l'héroïne. Il est surtout extrêmement frustrant, voire criminel, d'avoir Kate Winslet et Jennifer Ehle dans le même plan et ne leur faire échanger que deux répliques! Sans compter qu'il faudrait donner de vrais rôles à la seconde et arrêter de la cantonner à de la figuration, surtout qu'elle joue ici la favorite du roi, personnage brillant s'il en est, qui aurait mérité d'avoir un temps d'écran plus conséquent. Après, ça reste tout de même plaisant d'avoir cette galerie de grands noms de l'époque pour les voir s'échanger quelques bons mots, quitte à sacrifier allègrement la réalité historique pour plus de fun, à l'image du lever du roi filmé comme une pub Ricoré ou de la Montespan en émouvante mécène qui tient une cour secrète composée de femmes ayant perdu un enfant, encore qu'on imagine mal la favorite se présenter à la belle-sœur du roi, techniquement plus haute qu'elle dans la hiérarchie, en s'exclamant "Copiiiiiine!" comme si elle parlait à sa coloc de cellule au couvent, avant leurs débuts dans le monde.

L'histoire est donc un peu décevante, mais le voyage reste joli, sans jamais ennuyer. Et c'est toujours un plaisir de retrouver Kate Winslet, l'une de mes très rares idoles contemporaines que je pourrais aller voir dans tout, même si, toute parfaite soit-elle, sa performance n'est pas aussi brillante que certaines de ses compositions d'autrefois. Tout du moins reste-t-on en terrain connu. C'est en fait Stanley Tucci qui emporte le film avec lui, et ce avec en tout et pour tout une unique séquence, mais j'attends avec impatience de retrouver Kate Winslet dans The Dressmaker. 5/10.

Et vous? Des découvertes intéressantes récemment?

mercredi 13 mai 2015

Nouvelles


Coucou mes Irving chéris,

Je prépare trois longs articles, en ai un quatrième à réécrire et, cerise sur le gâteau, suis en période intensive de répétitions, aussi n'ai-je pas le temps de poster des nouveautés en ce moment. Mais j'ai quand même envie d'écrire, alors voici quelques nouvelles en vrac, histoire d'huiler la machine un minimum.

* Après trois ans d'intense réflexion, j'ai enfin trouvé mon système définitif pour mes Orfeoscars! Non, vous ne rêvez pas, et je sais que j'ai passé mon temps à changer d'avis, mais j'ai eu une révélation extrêmement apaisante en me promenant l'autre jour: je vais bel et bien prendre en compte les films étrangers dans ma liste. J'ai été réticent un moment, en particulier à cause de ma passion aiguë pour les actrices américaines des années 1930, dont l'ardeur laisse peu de place à leurs collègues du reste du monde, mais devant la maigreur de certaines catégories, devant le fait évident que les Oscar eux-mêmes ont sélectionné plein de films étrangers, y compris dès les premières années (A nous la liberté nommé pour ses décors par exemple), et devant l'apport évident de grands noms du monde entier à l'éclat de l'Âge d'or hollywoodien (Lubitsch, Wyler, Wilder, Garbo, Negri, et tant d'autres), il n'y a en fait aucune raison de snober les films non anglo-américains.

D'ailleurs, il y a quelque chose de fort excitant à réintégrer les films étrangers dans mes sélections, à savoir que ça augmente le suspense avec d'autant plus de candidats talentueux, et ça me permet d'obtenir des catégories vraiment enthousiasmantes plutôt que de racler parfois les fonds de tiroir pour monter jusqu'à cinq places en cas d'années peu inspirantes. J'ai donc décidé que tout film non anglophone sorti aux Etats-Unis une année "a" sera éligible dans toutes les catégories, sauf meilleur film et meilleur réalisateur en raison de la catégorie spécifique "meilleur film étranger". Je garde ainsi un ancrage américain, ce qui est essentiel pour parler de ma passion pour le cinéma hollywoodien, m'aligner sur les Oscar et avoir un point d'appui à partir duquel s'organiser, mais tout sera donc éligible en fonction de la date de sortie aux Etats-Unis, quelque soit l'Etat, et non pas la seule Californie comme le font les Oscar, au risque parfois d'incohérences (voir mes précédents articles où je remets en cause les problèmes de dates de sortie entre New York et Los Angeles, d'où un décalage qui n'a pas lieu d'être pour certains films lors des cérémonies: Camille sera alors un film de 1936, Casablanca un film de 1942, etc).

Les deux seuls bémols ce faisant, c'est l'absence de certains films chinois ou japonais des années 1940/1950 que j'affectionne beaucoup mais qui ne sont pas sortis aux Etats-Unis avant les années 1970 voire 1990, ce qui les rend alors inéligibles car le décalage avec la date de production originelle serait vraiment trop grand: pour être éligible, le film doit rester dans l'air du temps, et je ne m'autorise que deux ans de décalage maximum. La dernière faiblesse, c'est qu'il faudra accepter l'idée que de 1930 aux années 1940, je n'aurai que des actrices hollywoodiennes dans mes sélections, mais je suis trop captivé par elles pour faire autrement. Par bonheur, pour les autres périodes, j'aurai l'occasion de parler d'actrices étrangères que j'aime énormément, de Danielle Darrieux à Gong Li, en passant par Liv Ullmann (qui a quand même régné sur la critique américaine des années 1970 avec trois prix à New York en cinq ans!) et bien d'autres encore.

* J'ai enfin résolu le duel Mae Clarke / Miriam Hopkins de 1931. En effet, je viens de découvrir plusieurs films de Mae Clarke et je suis convaincu qu'elle est une actrice talentueuse dotée d'une forte personnalité particulièrement plaisante, mais elle n'a pas réussi à me convaincre qu'elle était une actrice de génie du même calibre que sa rivale, hormis dans son tour de force de Waterloo Bridge. Et certes, il est difficile d'en juger parce que la pauvre s'est laissée enfermer trop vite dans de la série B de la pire espèce, mais le fait est qu'elle ne m'a laissé aucun souvenir dans Penthouse, que je la trouve peu inspirée dans Frankenstein, qu'elle est assez insupportable dans Penguin Pool Murder (ce titre...), qu'elle est éclipsée par une grappe de raisins dans The Public Enemy, et surtout qu'elle est très oubliable dans Turn Back the Clock malgré un propos alléchant sur le papier, et que toute énergique soit-elle dans Parole Girl, elle se révèle franchement maladroite dans sa façon de jouer, pleurant très mal, riant de façon affreusement forcée et surjouant avec ses yeux pour marquer une émotion forte.

Sa seule personnalité ne suffit donc plus à la rendre aussi prodigieuse que j'aurais voulu le croire de prime abord, aussi n'ai-je plus aucun scrupule à donner mon prix de 1931 à Miriam Hopkins, qui m'a évidemment prouvé l'étendue de son génie par ailleurs. Le seul bémol, c'est que Miriam est assez indépassable pour le prix du second rôle cette même année, et je ne suis pas sûr de trouver une actrice assez forte pour la remplacer dans cette catégorie. Mais n'ayant pas encore exploré l'année de fond en comble, nous ne sommes pas à l'abri d'une bonne surprise, d'autant que donner deux trophées à Miriam en une seule soirée risque de conduire à un bashing de la part de tous les internautes qui y verraient un coup d'Etat... Mais je veux Miriam en premier rôle au moins une fois, et 1931 reste un grand moment pour ce faire. Elle remportera sans surprise le prix du second rôle 1949, alors explorons 1931 pour trouver une concurrence digne de ce nom.

* Au programme de ce mois de mai: mise à jour des Orfeoscars 1933 (le nombre de films vus vient de doubler et il faut changer plein de candidats dans certaines catégories); publication de l'inventaire 1933, pour déterminer ce qui vaut le coup d'être vu ou non; publication des Orfeoscars 1930, avec moins de films vus que pour 1933 mais dont le nombre reste assez conséquent pour jouer; publication de l'inventaire 1930; et si j'ai le temps, une petite histoire avec Greta Garbo et Tallulah Bankhead dans un train hongrois... Je mets 1956 de côté pour le moment mais on y reviendra très vite, promis, ainsi qu'à 1939 dont l'inventaire et les Orfeoscars paraîtront sous peu également. Pour patienter, je parlerai de quelques films récemment découverts.

A très vite!

samedi 2 mai 2015

Divas au soleil


J'adore la pluie. J'aime tout particulièrement les jardins d'avril fleuris sous un ciel gris et rien ne m'excite plus que d'entendre gronder l'orage en promenade, avec le risque de finir trempé si on ne presse pas le pas. Ceci dit, j'aime surtout les choses avec leur contraire, et lorsque la pluie ne cesse de tomber du matin au soir, j'en viens à vivement regretter un joli soleil de plomb aperçu sous un feuillage rafraîchissant. Pour oublier le mauvais temps de ces derniers jours de vacances qui m'empêche de sortir sous peine de ressembler à ça, j'en profite alors pour parler de Meurtre au Soleil (1982), histoire de continuer notre périple christien en compagnie d'un casting de luxe, et ce dans de fabuleux décors des îles de la Méditerranée, des lieux qui devaient être absolument enchanteurs à l'époque de l'histoire, avant que la pythie de Delphes ne décide de les polluer pour les trois prochains siècles en une unique pression du doigt.

Première surprise en redécouvrant le film: c'est beaucoup plus réussi que dans mon souvenir. Je donne quand même ma préférence à Mort sur le Nil qui m'a fait vibrer de bonheur lorsque je suis resté deux mois à l'hôpital au collège, mais Meurtre au Soleil est encore mieux photographié, avec de jolies couleurs qui mettent d'autant plus en valeur les lieux de l'intrigue que les teintes délavées des autres films christiens, et côté musique, la réussite est absolue, avec une partition entièrement adaptée de Cole Porter, que je préfère même aux chansons originales, c'est dire. Je suis généralement peu inspiré par la catégorie oscarienne de la meilleure musique adaptée, catégorie ayant disparu dans les années 1980, mais les airs réjouissants de Meurtre au Soleil justifieraient à eux seuls l'existence d'un tel prix, sachant que le lauréat de 1982, Victor Victoria, aurait été plus à sa place comme musique originale. Par ailleurs, le film qui nous occupe est franchement ludique puisqu'on peut réellement résoudre l'énigme en même temps que Poirot, pas comme dans l'Orient-Express où on n'était même pas fichu de nous montrer la lettre H brodée sur le mouchoir, et où les femmes de chambre mettaient la main à la pâte en grand secret. Quoi qu'il en soit, tous ces aspects contribuent à faire de Meurtre au Soleil un divertissement très honorable, idéal à regarder par temps de pluie pour s'évader dans de superbes décors supposément grecs quoique espagnols, et c'est évidemment un très grand plaisir de retrouver un casting très solide dominé par Diana Rigg et Maggie Smith.

Malgré tout, les véritables stars de Meurtre au Soleil sont en réalité les costumes d'Anthony Powell, qui, ayant visiblement trouvé qu'il n'avait pas eu la main assez lourde avec les turbans d'Angela Lansbury dans Mort sur le Nil, a décidé de transformer avec soin chaque acteur en meneuse de revue drag. Sincèrement, si l'on exclut le vermisseau soumis et sans volonté qui sert d'époux à Diana Rigg, son horrible rejeton maussade et James Mason qui a dû se faire piquer son moindre truc en plumes par sa femme depuis belle lurette, tous les personnages rivalisent d'ostentation comme pour décrocher le premier rôle d'un prochain spectacle queer, aussi me semble-t-il judicieux de regarder l'habituel top des protagonistes par le prisme de leurs costumes, du plus correct au plus grotesque, afin de déterminer qui aurait eu le plus de chances de détrôner Divine...

Garbo: I vant to be al...

Tallulah: Non, pas vous dahling, l'autre.

Orfeo: ... de son piédestal au tournant des années 1980. Et mine de rien, ce n'est pas chose facile considérant que chaque personnage se change en moyenne toutes les deux heures, en particulier Maggie Smith qui réussit l'exploit de porter cinq costumes différents le jour du meurtre, même pour aller du premier étage au rez-de-chaussée. Sachant cela, qui va gagner le prix de la queeritude ultime? [Attention, ça va spoiler méchamment à partir de maintenant.]

10 ~ Odell Gardener (James Mason)

Bon, évidemment il n'a aucune chance, mais il fallait bien trouver des noms pour monter jusqu'au top 10, et entre son petit œillet de poche et sa vulgarité non feinte, Mr. Gardener n'est pas le plus indigne du lot, quand bien même il s'agit là du moins bon rôle de l'iconique James Mason.

09 ~ La secrétaire (Barbara Hicks)

Je sais, elle fait de la figuration et n'apparaît que trois secondes sous la pluie londonienne, mais je suis sûr que sous ses airs de fonctionnaire frigide et renfrognée se cache une vraie bête de scène prête à voler la vedette à tout le monde, même aux drag queens les plus réputées.

08 ~ Le joli porteur

Suis-je le seul à trouver ce monsieur fort charmant avec sa peau basanée et son petit costume impeccablement taillé et moulant comme il se doit?

07 ~ Hercule Poirot (Peter Ustinov)

Certes un peu trop bedonnant pour être sexy, mais... Grands dieux, ce look! Avec ce maillot qui pousse le vice à porter les initiales du héros en écusson, ce peignoir aux animaux et ce bonnet de bain ressemblant méchamment à la coiffe d'une cantinière qui perd ses cheveux, voilà un personnage qui ne risque pas de passer inaperçu au bain. En espérant qu'Actéon ne soit pas dans le coin... Quoi que... Je doute qu'il s'y arrête longtemps...

06 ~ Patrick Redfern (Nicholas Clay)

Le doute n'est plus permis: si vous avez des interrogations sur le public visé par ce film, ce maillot de bain pas du tout tendance années 1930 achèvera de vous convaincre. Dommage que le modèle soit franchement falot, imberbe et ne puisse rien faire pour dissimuler ses bourrelets, ce qui à la réflexion rend l'expérience bien moins sexy qu'elle n'en a l'air. On notera en tout cas que le photographe a très bien saisi les enjeux du film en ne prenant même plus la peine d'avoir la tête du personnage dans le cadre au fur et à mesure des séquences au bord de l'eau. On classera néanmoins l'acteur assez haut car les lois mathématiques sont imparables: de jolies fesses seront toujours plus attrayantes que des aisselles flasques sauce poireaux. Mais je préfère quand même le joli porteur de bagages.

05 ~ Rex Brewster (Roddy McDowall)

Mais qui a eu la bonne idée de nous rappeler toutes les deux secondes, ô pauvres spectateurs, que le personnage joué par Roddy McDowall est homosexuel? Parce que c'est vrai qu'entre son admiration sans bornes pour une starlette à paillettes, ses tenues de marin et ses petites danses super maniérées, on avait encore quelques doutes. Ma préférence va néanmoins à sa tenue de soirée assez chic, l'écharpe autour du cou le faisant certes ressembler à un éditorialiste aussi nullissime qu'inutile tout en le rendant malgré tout plus séduisant que son peignoir de capitaine de sitcom.

04 ~ Christine Redfern (Jane Birkin)

"Oooooh! Je suis une pauvre petite chose malheureuse et trompée qui fond comme neige au soleil au moindre rayon. Snif snif. Oh! Et en plus j'ai le vertige. Bouh. Que je suis à plaindre. Ou pas. Niark niark niark!" On adore tout particulièrement la métamorphose de la dame qui intervient quand celle-ci en a techniquement le moins besoin, mais qu'importe, sa sortie de scène est irrésistible, quand bien même son chapeau de trois kilomètres de diamètre ne lui sied guère, à force d'étouffer le semblant de charisme qui lui reste. Allons, je suis mauvaise langue: Christine n'est pas qu'une pauvre geignarde insignifiante puisqu'elle sait tout de même faire preuve de dynamisme en invitant la grognasse maussade à venir faire du dessin avec elle à la plage. Mais avouons que ses épaulettes beaucoup trop larges, ou que ses rayures même pas fichues d'aller dans la même direction, la mettent nettement moins en valeur que son kimono certes excentrique et sans doute inconfortable à force de voler dans tous les sens, mais dont les couleurs s'accordent mieux à son teint.

03 ~ Arlena Marshall (Diana Rigg)

Attention, on entre ici dans le trio de tête, et ça envoie du lourd! Diana Rigg se défend en tout cas très bien en n'hésitant pas à se vêtir de rouge, quitte à assortir sa robe du soir à la couleur de ses lèvres, et revêtant également des tenues décolletées très métalliques, un ensemble noir et blanc à rayures et un supêêêrbe maillot à pois multicolores qui devrait faire pâlir de jalousie toutes les clientes des clubs de thalasso du monde entier. Un petit bémol tout de même, car le personnage dépasse allègrement les bornes de la vulgarité autorisée, mais on adore malgré tout son petit sourire faussement étonné lorsqu'elle s'en prend à son admirateur préféré, sa façon de rabrouer l'insupportable ado maussade pas particulièrement polie elle non plus, et surtout son petit duel en musique avec la rayonnante...

02 ~ Daphne Castle (Maggie Smith)

... qui peut lui en remontrer à chaque instant sur le terrain vestimentaire, mais aussi sur le terrain de la drôlerie, puisque le personnage reste hilarant à toujours chercher un coupable via des hypothèses franchement abracadabrantes. Sans parler de son petit sourire de fierté lorsqu'elle parvient à compter sur les doigts du détective avant de se laisser duper en beauté. En tout cas, nous avons là une diva de choix, dont le fort potentiel queer est visible dès l'entrée en scène avec ses gestes maniérés pour ouvrir un rideau. Quant à ses tenues, ça oscille entre des vestes à pois qui ont l'air d'embarrasser l'actrice en premier lieu avec leurs motifs tout droit sortis d'un fond de placard de cuisine d'une école maternelle des années 1970; une veste métallique destinée à l'aider à voler la vedette à sa rivale, une veste incrustée de faux bijoux tous plus kitsch les uns que les autres alors qu'elle sert des saucisses lors d'un mot d'esprit très subtil envers les anciens succès d'Arlena; et une tenue de promenade gay friendly ornée d'un T-shirt aux couleurs de l'arc-en-ciel. Dommage que son ombrelle chinoise n'ait pas, comme la mienne, des nénuphars peints dessus. Dommage également que ses grosses lunettes rondes franchement affreuses n'aient pas le même effet que celles portées par...

01 ~ Myra Gardener (Sylvia Miles)

... notre grande gagnante de la soirée, parce que chacune de ses tenues, depuis le chemisier bleu à pois blancs au maillot de bain avec gros nœud de caniche dans les cheveux, en passant par les chaussons velus ultra vulgaires, la robe rouge et jaune métallisée, le voile de pharaonne et le look bleu de la mort qui tue, est à mourir de rire! Attention, si vous avez l'audace de cliquer sur les photos pour les avoir en gros plan, je ne réponds de rien! Le plus monstrueux, c'est lorsqu'on prend deux minutes pour écouter le doublage français opéré par nulle autre que Micheline Ursula Dax, ce qui nous ramène bel et bien à Divine et achève de faire du personnage une gorgone tellement vulgaire que même la pauvre Méduse en serait pétrifiée d'effroi: "N'est-ce pâââââs Octââââââve?" "Plutôt la clâââssique rrrrâge de dents de la crrrrroqûêûse de diamânts!" "Vous êtes producteuuuur! N'est-ce pâs mon chouuuu?" Ceci dit, rien que la version originale vaut son pesant d'or avec toutes les grimaces et sourires carnassiers de l'actrice qui, étant toujours et fort heureusement parmi nous, ferait bien de se lancer dans une comédie musicale sur les trois Gorgones: ça ferait fureur dans le monde de la nuit!

Voilà, j'espère sincèrement que ces articles christiens vous auront plus. Nous finirons par deux mots sur Rendez-vous avec la mort, également meilleur que dans mon souvenir, avec plein de jolies images pour touriste pas très difficile, et où Piper Laurie et Lauren Bacall rivalisent de rires narquois parfaitement jouissifs, notamment la première qui sait comment regarder un adversaire pour le fusiller dans la seconde avec un incendiaire: "And I can prove it." Dommage que le film suinte les années 1980 par tous ses pores, en particulier avec le beau gosse musclé tout droit sorti d'une pub pour rasoirs jetables. Mais tous vulgaires soient-ils, ces films n'en restent pas moins hautement divertissants et toutes ces vieilles divas peinturlurées sont irrésistibles chacune à leur manière. De là à conclure par un top 10 des meilleurs personnages christiens de cinéma? Peut-être dans un prochain article.