vendredi 30 septembre 2016

Hers to Hold (1943)


Je m'éparpille complètement, mais il m'est vraiment difficile de trouver l'inspiration pour parler des films français de Romy Schneider. Alors, interlude musical en compagnie de Deanna Durbin. Pourtant, Hers to Hold est un assez mauvais film sur lequel il n'y a pas grand chose à dire…


Réalisée par un parfait inconnu, Frank Ryan, qui compte également le médiocre Can't Help Singing à son actif, cette comédie dramatique se veut le troisième volet de la trilogie non officielle des aventures de Penny Craig, après Three Smart Girls et Three Smart Girls Grow Up. C'a même failli s'appeler Three Smart Girls Join Up, pour bien ancrer l'histoire dans l'actualité de la guerre au moment du tournage. Malheureusement, autant le premier opus était charmant à défaut d'être vraiment bon, et autant le second était aussi irrésistible que délicieux, autant celui-ci est une cuisante déception.


En effet, la divine Penny, magnifiquement espiègle la décennie précédente, a hélas perdu une bonne part de sa personnalité : elle n'est plus qu'une jeune fille des plus banales en attente de se marier, et elle n'a même plus la compagnie de ses sœurs pour échafauder de multiples intrigues de cœur. Ce qui ne veut pas dire que la performance d'actrice soit dénuée d'humour, mais ça manque énormément de relief par rapport aux œuvres précédentes : Penny se tord la bouche pour piéger un imposteur, elle lui glisse une rose entre les lèvres après avoir chanté la séguedille de Bizet, au cours d'une amusante scène où elle tente d'arracher le pauvre Joseph Cotten des griffes d'une mondaine bavarde, et… elle porte des lunettes ! C'est tout ! Il est vrai que ses tenues d'ouvrières (elle s'engage dans l'effort de guerre) avec rubans dans les cheveux détonnent totalement par rapport aux tâches qu'on lui demande d'effectuer, mais ça ne fait pas rire pour autant. Ceci dit, le deuxième acte sur la guerre, succédant à la romance, n'est pas censé être drôle, le scénariste cherchant au contraire à capter l'air du temps, en montrant les inquiétudes de la fiancée pendant que le soupirant part en mission dans les raids aériens. Mais du coup, le film devient trop manifestement un prétexte au patriotisme d'alors, au lieu de se chercher une identité propre. On perd donc totalement l'esprit des Three Smart Girls, ce qui est bien dommage, en particulier à cause de cette deuxième partie interminable où l'on nous montre toutes les perceuses imaginables quand on ne sait plus quoi raconter.


Néanmoins, le second acte n'est pas seul fautif, la romance du début étant déjà de très mauvais augure, avec ce personnage ignoble d'amoureux transi incarné par Joseph Cotten. Celui-ci voit une paire de jambes appartenant à Penny venue donner son sang à l'hôpital, le voilà qui en tombe aussitôt amoureux, et il se met à l'embrasser de force après quarante secondes d'une cour débridée pendant laquelle il n'a même pas songé à regarder le visage de l'inconnue. Deanna se défend mollement, préférant gifler le véritable infirmier qui vient s'enquérir de sa santé et qu'elle prend à tort pour un second séducteur, mais le pire dans tout ça, c'est le discours au premier degré de Joseph Cotten lorsqu'il manigance un plan pour retrouver Penny après l'entrevue à l'hôpital. En effet, alors que son ami lui fait remarquer qu'elle n'avait pas envie d'être embrassée de force, celui-ci répond que "lorsqu'une femme dit non, elle veut dire oui." Et ça n'est jamais remis en question par la suite. Merci Hers to Hold pour ce brillant discours d'avant-garde. Penny n'a d'ailleurs jamais l'air gêné de voir l'agresseur la suivre partout à sa propre réception, et préfère s'amuser avec lui pour mieux le démasquer aux yeux des véritables invités. Mais voilà, le film s'ingénie à la faire tomber amoureuse après un baiser forcé, et l'on est supposé prendre ça pour un sommet de romantisme.


Heureusement, la séduction véritable affleure quand Deanna se met à chanter, dont la séguedille de Carmen, Begin the Beguine de Cole Porter, et Say a Prayer for the Boys Over There. Cette dernière chanson, très patriotique, fut nommée à l'Oscar et sied bien au ton de la deuxième partie, mais ça contribue hélas à ancrer le film dans son peu subtil aspect propagandiste, ou tout du moins patriotique. Bref, la guerre est passée par là en 1943, et l'on regrette vivement le charme à l'ancienne des films précédents de la star, tels First Love ou Spring Parade. Reconnaissons néanmoins que la mélodie et le tempo ne déparent pas par rapport aux chansons romantiques dans lesquelles s'était spécialisée Deanna.


Moralité: Hers to Hold est un film décevant, un curieux mélange de comédie et de patriotisme qui privilégie les séquences de perceuses au détriment de la réelle personnalité de Penny Craig. La tonalité ultra sexiste de la rencontre n'arrange en rien les choses. Autrement, Deanna est amusante quand il le faut et toujours irréprochable au niveau du chant, mais on aurait aimé un peu plus d'efforts dans les séquences de fiancée inquiète, parce que le ventilateur qui lui fait voler les cheveux fait cent fois plus pour l'émotion de ces moments que le visage trop impassible de l'actrice. Je ne me sens pas le courage de descendre jusqu'à 4, en raison d'une séguedille vraiment drôle, mais on en restera à un pénible 5-.

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